Postface pour "La Maison loin de la mer" de France Burghelle Rey par Michel Ménaché

Chère France,

J'ai lu attentivement La maison loin de la mer.

Ce texte sensible se veut intime, voire confidentiel, dans la discontinuité des souvenirs,

avec le parti pris intéressant de l'alternance prose / poèmes. 

Paradoxalement, ce qui traverse à l'excès ce texte,

c'est le patchwork de citations qui noie un peu le lecteur, sans l'ennuyer cependant... 

Tu dis pratiquer une "autobiopoésie"... 

Ici, ce sont les livres qui prennent le pas sur le vécu !!! 

En effet, c'est une grande lectrice qui écrit mais c'est comme si elle dressait un paravent

 de sa bibliothèque pour compenser le manque, peupler sa solitude.... "Une vie sans but"

mais une vie dans les livres !

Poésie-journal ? Reconstruction intemporelle à partir des expériences fondatrices de l'enfance et de la jeunesse.

L'écriture s'impose dans ce texte comme réparation de soi / des blessures intimes

Tu exprimes avec des mots très justes la difficulté d'être et de communiquer :

"Chez lui je suis sans fenêtre, prisonnière de l'air..."

"nous resterons jumeaux"

"Amputée de moi-même", etc.

Et ce pas important, comme une déchirure intime :

"Voici que pour la première fois j'écris un livre au féminin..."

Un traumatisme à peine évoqué mais qui semble un repère biographique essentiel :

"Belle cousine que j'aimais tant / Je l'appelais 'ma fille' " ... Autocensure ? / Pudeur extrême ?

La parenté avec Colette s'impose à plusieurs reprises... Attachement à la terre / à la maison d'enfance / le premier jardin...

"La terre entremetteuse"...

Tu dis aussi de l'écriture qu'elle est "le lieu de la répétition, du bégaiement". 

"Le poète est un glaneur quotidien" ( de Fernando Pessoa à Agnès Varda !)

Tu poses bien aussi la question de la vérité objective / subjective - l'écriture de soi...

 avec "L'objectivité des hasards"

"Toute la place est pour la beauté" (René Char)

Le travail psychanalytique sur soi ou l'écriture de soi comme révélateur de ce qui advient (Jacques Ancet), de ce qui est refoulé, etc.

Ta conversation avec Anne Clancier est à peine évoquée mais on reconnaît là la qualité de l'expertise psychanalytique...

Voilà donc quelques impressions dans le désordre...

Je ne pense pas qu'une préface soit nécessaire : ce texte existe tel quel avec tout l'étayage littéraire que tu as tressé avec ton intimité / autobiopoésie. 

                                                                    Michel Ménaché